Notre collègue Hicham Mourad, professeur de science politique à l’Université du Caire, et coordinateur du master de Relations internationales à l’Université française d’Égypte, est un intervenant régulier au master « Méditerranée-Moyen-Orient » de Sciences Po Grenoble. Il vient de signer une analyse des ambitions régionales respectives du Royaume d’Arabie saoudite et des Emirats arabes unis, pour en souligner à la fois les importants moyens, et les évidentes limites. Recension et commentaires.

MOURAD Hicham, Arabie saoudite et Émirats arabes unis : les ambitions de la puissance, Paris, L’Harmattan, Collection « Bibliothèque de l’IReMMO » no 37, octobre 2020, 160p.

Appuyant son analyse sur le cadre national (Chapitre I), l’auteur souligne tout d’abord, en toile de fond,  l’importance stratégique du retrait des Etats-Unis du Moyen-Orient depuis deux décennies (Chapitre II). Ce retrait résultant de la combinaison de plusieurs facteurs: 

  • la réduction drastique de la dépendance des Etats-Unis au pétrole du Golfe (les importations culminent en 2005, pour s’effondrer depuis, les Etats-Unis étant désormais exportateurs nets grâce aux hydrocarbures de schiste);
  • le glissement partiel des moyens militaires (ou, à tout le moins, annoncé), vers le “pivot asiatique” (du fait de la moindre importance des hydrocarbures du Golfe, et alors que la Chine monte en puissance dans l’aire Asie-Pacifique), même si le président Trump a maintenu des effectifs importants pour appuyer sa politique de “pression maximale” sur l’Iran;
  • la volonté politique d’extraire les Etats-Unis des conflits du Moyen-Orient depuis le fiasco irakien, de Barack Obama (Syrie, 2013) à Donald Trump;
  • le soutien de Barack Obama aux “printemps arabes” en 2011 (en “lâchant” le président égyptien Moubarak), qui a inquiété et mécontenté nombre de régimes arabes dans la région, et ravivé un antiaméricanisme latent.

L’Irak, démantelé par l’intervention anglo-américaine de 2005; l’Egypte, secouée à partir de 2011 par la chute d’Hosni Moubarak, puis l’élection du Frère musulman Mohammed Morsi, puis le coup de force du maréchal Sissi; et la Syrie, ruinée par une guerre civile régionalisée et internationalisée, sont sorties marginalisées de la décennie 2010. Ce qui a dégagé le champ pour une montée en puissance accrue des autres acteurs régionaux, en particulier l’Arabie saoudite et les Emirates arabes unis.


L’Arabie saoudite (Chapitre III), pivot de l’OPEP, gardienne des Lieux saints de l’islam et organisatrice annuelle du hadj (le pèlerinage à La Mecque), a pu continuer sa “diplomatie du carnet de chèques” en direction d’Etats faibles de sa proche périphérie (Soudan, Somalie, Érythrée), mais aussi à l’échelle internationale par la promotion de l’islam salafiste wahhabite. Elle a continué à procéder à des achats d’armes massifs, sans cesse sollicitée par les Etats vendeurs –Etats-Unis, France, principalement. Le royaume s’est ensuite lancé, sous la houlette du prince-héritier Mohammed ben Salmane (MBS) dans une offensive contre les houthis du Yémen qui se révèlera des plus hasardeuses. Le tout en promouvant un nationalisme saoudien, alors que les références étaient jusque-là plutôt tribalo-dynastiques, associant les Saoud et le wahhabisme originel.

Les Emirats arabes unis (EAU, Chapitre IV), sont qualifiés de « Sparte du Moyen-Orient arabe ». Ce qui renvoie l’action du prince héritier et ministre de la Défense d’Abou Dhabi, et homme fort de la fédération des EAU, Mohammed ben Zayed Al Nahyane (MBZ), qui s’emploie depuis 15 ans à faire des Emirats la première puissance militaire du Conseil de coopération du Golfe (CCG). Pour cela, il a procédé à des achats d’armes massifs auprès des Etats-Unis, de la France et du Royaume-Uni (parmi bien d’autres vendeurs). Il dispose désormais de forces aériennes, maritimes et terrestres conséquentes. Y compris avec des armements de pointe en général réservés aux seuls pays producteurs, le tout avec sur son sol une importante base américaine, et une base inter-armes française . Les EAU sont intervenus au Yémen en 2015, dans le cadre de la coalition montée par Riyad, avec un partage des tâches: à l’Arabie saoudite les bombardements aériens et le nord du Yémen; aux EAU, des opérations conjointes aériennes et terrestres au sud du Yémen (en s’appuyant sur des bases périphériques,  Socotra[1] et Assab, en Erythrée[2]). Entre Arabie saoudite et Iran, Abou Dhabi manque toutefois de profondeur stratégique, et ses routes maritimes dépendent de la libre circulation des pétroliers et des porte-conteneurs dans les détroits d’Ormuz et de Bab el Mandeb, et dans l’océan Indien, zones sur lesquelles les EAU ont mis l’accent dans la dernière décennie [3]. Confronté à l’enlisement de ses offensives au sud du Yémen, et aux difficultés à gérer à la fois les indépendantistes sud-yéménites et les djihadistes de l’arrière-pays, MBZ a opéré un large retrait de ses forces depuis l’été 2019. D’autant que les tensions n’ont cessé de monter dans le Golfe, résultat prévisible du bras de fer imposé par le président Trump au régime de Téhéran, celui-ci répondant à la “pression maximale” de Washington par une “résistance maximale” s’exerçant sur des terrains instables –l’Irak, mais aussi sur le sol saoudien lui-même [4].


Hicham Mourad s’attaque ensuite à un élément structurant des tensions régionales depuis 1979: la rivalité entre Riyad et Téhéran, les positionnements anti-iraniens des EAU n’étant pas à négliger (Chapitre V). IL s’agit d’une rivalité de puissances, qui s’est accentuée depuis que le “troisième pilier” historique dans le Golfe, l’Irak, a été “sorti du jeu” avec le renversement de Saddam Hussein en 2003. Les terrains de déploiement de cette rivalité sont multiples, de la Syrie à l’Irak, du Liban au Yémen, où se multiplient les affrontements par proxies interposés. L’auteur développe l’exemple du Yémen, où un conflit historique local bien connu depuis le milieu du XXe siècle (déjà au temps de Nasser, les tribus du nord royalistes contre les républicains du sud…) s’est régionalisé avec l’intervention saoudienne de 2015.

L’Iran y a vu initialement une occasion supplémentaire de mener une offensive propagandiste contre Riyad, son soutien aux “rebelles houthis chiites zaïdites” ayant beaucoup moins avoir avec le chiisme (les chiites zaïdites sont fort éloignés aux plans théologiques et rituels des duodécimains iraniens…) qu’avec le bras de fer avec le royaume saoudien. Hicham Mourad souligne néanmoins, à juste titre que,  chez les souverains arabes sunnites, le sentiment anti-iranien est indubitablement renforcé par une hostilité viscérale au chiisme, en particulier au sein du régime saoudien.  L’auteur estime que la République islamique peut, en effet, représenter une forme de modernité menaçant le modèle saoudo-wahhabite (même s’il se dit que le prince héritier MBS chercherait à réduire la place du wahhabisme dans son projet de modernisation Vision 2030). Le débat reste ouvert sur ce volet.

Pour en revenir au Yémen, où le conflit,  à la fois tribal, ethnique, national et  idéologique, a provoqué une crise humanitaire dramatique, le soutien militaire iranien aux houthis a été et reste très largement surestimé par les régimes arabes, eu égard à un embargo international qui réduit beaucoup la possibilité de livrer des armements lourds aux houthis. Les pages ensuite consacrées à la volonté saoudo-qatarie de « contrer l’influence iranienne dans la Corne de l’Afrique » soulignent à la fois que Riyad et Abou Dhabi ont survalorisé cette présence iranienne (comme élément de justification supplémentaire à l’intervention au Yémen?), et que ce terrain africain est éloigné des préoccupations de Téhéran, alors que de nombreuses autres puissances y avancent leurs pions (à commencer par les EAU à Djibouti et en Erythrée, mais aussi la Turquie, la Chine, l’Inde…) . La République islamique est évidemment prioritairement concernée par ses flancs ouest (Golfe, Irak, Syrie, Liban) et est (Afghanistan-Pakistan).


Hicham Mourad consacre ensuite un long développement (Chapitre VI) à la rivalité saoudo-émirienne avec le Qatar [5], et avec la Turquie. La crise ouverte en 2017 au sein du CCG – stigmatisation de l’Emirat du Qatar par Riyad, Abou Dhabi et leurs alliés; rupture des relations diplomatiques;  embargo terrestre et aérien;  conditions léonines pour amener Doha à récipissence, etc.,  est analysée sous ses différents aspects. Sans qu’il nous paraisse pouvoir véritablement être qualifié de “troisième acteur régional”, le Qatar est certes un petit émirat, mais richissime car doté des troisièmes réserves de gaz de la planète, qui en ont fait le premier exportateur mondial de GNL. Et Doha a réussi en quelques décennies à se faire un nom à l’échelle globale, ne serait-ce que par une “diplomatie du sport” bien connue en France; et par un vecteur audio-visuel qui a joué un rôle d’acteur de plein exercice dans les printemps arabes de 2011 – Al-Jazeera. Ses adversaires ont donc fait feu de tout bois. On se souvient qu’en 2017, le Qatar a été accusé de complaisance pour Téhéran (y compris avec des déclarations attribuées à Doha, mais forgées de toutes pièces[6]) – alors que le réalisme s’impose évidemment aux Qataris (North Dome) qui partagent avec les Iraniens (South Pars) l’énorme dôme gazier du Golfe qui fait leur fortune. Le Qatar (pourtant salafiste wahhabite comme l’Arabie voisine) est accusé –non sans fondements, en l’occurrence- de promouvoir les Frères musulmans, honnis et persécutés plus encore dans les EAU qu’en Arabie saoudite –pour ne pas parler de l’Egypte depuis 2013.

A cette équation déjà complexe (jeux d’influences, rivalités d’images et de soft power sportif, fréristes et anti-fréristes, tropisme iranien supposé, etc.) s’est ajoutée le jeu de la Turquie de Recep Tayyip Erdoğan [7]. Qui, en 2017, proche des Frères musulmans (et donc soutien du Frère Morsi contre le maréchal Sissi en Egypte), a lâché sa relation avec l’Arabie saoudite pour épouser la cause du Qatar –jusqu’à installer une base militaire dans la banlieue de Doha [8].  L’auteur –Egyptien, donc évidemment particulièrement au fait des enjeux de la mer Rouge, montre comment l’Arabie saoudite et les EAU (mais on n’oubliera pas le rôle du grand voisin égyptien, qui dispose, en particulier, de moyens maritimes très conséquents) se sont employés à endiguer les ambitions turco-qataries dans la zone mer Rouge-Corne de l’Afrique. Le changement de régime à Karthoum les a sans doute aucun aidé pour cela: la Turquie nourrissait, avec le soutien financier du Qatar, de grandes ambitions au Soudan –dans le golfe de Suakin en particulier… mais le vent y a tourné pour Ankara et Doha.

L’ouvrage de Mourad a été bouclé avant que ne soit annoncée –unilatéralement par Riyad et Abou Dhabi – la levée des mesures anti-qataries et le “retour de la concorde au sein du Conseil de coopération du Golfe” [sic]: une décision qui ne doit rien à des concessions de Doha, mais tout à la crainte de voir arriver à la Maison Blanche l’administration Biden, évidemment beaucoup moins bien disposée à l’égard du régime des Saoud que Donald Trump, qui avait consacré au royaume son premier voyage officiel à l’étranger en 2017… Mais ce revirement saoudien n’affaiblit pas les pages consacrées par l’auteur à cet épisode qatari, démonstation, s’il en est besoin,  des faiblesses internes structurelles du CCG, et des rivalités qui le minent depuis sa création, en 1981 – et que feu le sultan Qabous d’Oman (disparu en janvier 2020) avait maintes fois soulignées.


Hicham Mourad termine son tour d’horizon sur les limites de l’alliance Arabie saoudite-Emirats arabes unis (Chapitre VII). Le conflit yéménite en offre évidemment la meilleure illustration. Leur intervention conjointe à partir de 2015 a eu  l’effet inverse de celui qui était escompté, en resserrant les liens (jusque-là quasi inexistants) entre l’Iran et les houthis. D’autre part, chacun des deux acteurs principaux a eu ses propres logiques de guerre à partir de 2015 – plus claires d’ailleurs pour les Emiratis (qui ont visiblement encouragé le sécessionnisme sud-yéménite, et cherché à sécuriser des escales maritimes le long des côtes de la région, du Yémen à la Corne de l’Afrique) que pour les Saoudiens (au-delà de la volonté de Riyad de réinstaller à Sanaa un pouvoir pro-saoudien). Au final, après le retrait progressif des EAU à partir de 2019, Riyad se retrouve enlisée dans ce conflit, avec au surplus une nouvelle administration américaine qui a immédiatement signifié sa volonté d’arriver au plus vite à une suspension de la guerre.

Mais, et c’est moins souvent souligné, on ne saurait occulter la rivalité qui ne peut aller que croissant entre le prince héritier saoudien, MBS, et celui qui est classiquement présenté comme son “cousin et mentor” MBZ. Car la montée en puissance militaire des EAU, et l’aguerrissement des troupes émiraties sont de plus en plus souvent comparés aux failles et aux incompétences militaires du royaume saoudien. Lequel ne brille pas, ces deux dernières années, par sa capacité à se protéger des attaques extérieures de drones et de missiles de croisière. Qui ont frappé de manière répétée des sites pétroliers stratégiques de l’ARAMCO (en particulier le 14 septembre 2019), et des aéroports civils et militaires saoudiens, y compris, à plusieurs reprises, l’aéroport international de Riyad. Autant de cibles en principe protégées par les couvertures radar et antimissiles saoudiennes et américaines, qui ont ainsi démontré leurs insuffisances. Face à des frappes systématiquement revendiquées par les rebelles yéménites, mais dont il est évident qu’elles viennent pour partie d’Iran, en ayant transité par des sites de lancement dans le sud de l’Irak…


Le manuscrit d’Hicham Mourad a été terminé à l’été 2020. Depuis, plusieurs évènements ont impacté la région du Golfe:

  • l’effondrement des prix du baril, qui pèse lourdement sur les budgets des pétromonarchies, et donc sur leurs capacités de financement de projets ambitieux – par exemple la reconversion post-pétrole envisagée par la Vision 2013 de MBS pour le royaume saoudien;
  • la “normalisation” des relations entre Israël et plusieurs Etats arabes dont, pour le Golfe, les EAU, et le royaume du Bahreïn (à la fois vassal et poisson-pilote du royaume saoudien). Pour le moment, le positionnement de Riyad reste à préciser, sans doute tiraillé entre les bénéfices potentiels d’une normalisation avec Jérusalem peut-être souhaitée par MBS (investissements high tech, axe sécuritaire contre l’Iran), et les obstacles perçus par son père le roi Salmane (l’Arabie comme pôle principal de l’islam sunnite, pouvant difficilement sacrifier la ville sainte de Jérusalem, et accessoirement les Palestiniens);
  • le changement de président et de ligne politique à la Maison Blanche, dont on commence juste à percevoir les linéaments – en tous cas une mauvaise nouvelle de plus pour MBS qui, vu de Washington, additionne l’assassinat de J.Khashoggi, l’aventurisme au Yémen et un bilan désastreux en matière de droits humains… Sans compter la volonté affirmée par le président Joe Biden de reprendre en compte l’accord de Vienne de 2015 sur le nucléaire iranien.

On formulera un petit regret: que l’Egypte ne tienne pas plus de place dans l’analyse, à la fois comme acteur historique, démographique et militaire évidemment essentiel à la charnière péninsule Arabique-Méditerranée orientale – Afrique orientale; et comme économie en difficulté, en partie dépendante de l’aide financière des pétromonarchies  du Golfe. On peut toutefois, bien évidement, comprendre ce choix de l’auteur.

Pour autant, le travail très documenté d’Hicham Mourad (les trente pages de notes et de bibliographie en témoignent) et son analyse scrupuleuse et fouillée resteront une solide référence pour une approche raisonnée des instabilités de la région du golfe Persique.  

Jean-Paul BURDY


NOTES

[1]  Voir notre post de blog du 25 avril 2019 : L’île de Socotra, entre guerre au Yémen et ambitions émiraties (2015-2018) – Questions d’Orient – Questions d’Occident (questionsorientoccident.blog); et notre article : «Socotra, entre guerre au Yémen et ambitions émiraties », Carto, no 49, septembre-octobre 2018, 82p., p.48-49.

[2] Voir notre post de blog du 21 janvier 2019 : Des armements français utilisés au Yémen depuis 2015. L’exemple de la base émiratie d’Assab, en Erythrée – Questions d’Orient – Questions d’Occident (questionsorientoccident.blog)

[3] Voir notre post de blog du 16 juin 2019 : Socotra, Golfe d’Aden, corne de l’Afrique, mer Rouge: le « collier de perles » de l’impérialisme régional des Emirats Arabes Unis depuis 2015 – Questions d’Orient – Questions d’Occident (questionsorientoccident.blog) ; et notre article : «Socotra, Golfe d’Aden, corne de l’Afrique, mer Rouge: un « collier de perles » de l’impérialisme régional des Emirats Arabes Unis depuis 2015? »,  Moyen-Orient no 42, avril-juin 2019, p.80-85.

[4]  Voir notre article : « La « résistance maximale » de l’Iran à la « pression maximale » de Donald Trump », Paris, La Documentation française, Questions internationales no 103-104, septembre-décembre 2020, p. 66-76.

[5] Le titre du paragraphe 6-1 est « La perception (…) de la menace qatarie » : au-delà des contentieux idéologiques et sportifs, « menace qatarie »  nous semble un peu excessif ?

[6] Voir notre post de blog du 10 janvier 2019 : « Qatar Bashing ». Les cyberattaques et la désinformation dans la crise du Qatar en 2017 – Questions d’Orient – Questions d’Occident (questionsorientoccident.blog)

[7]  Cf. Jean MARCOU (dir.), La Turquie et ses nouveaux « alliés », Orients Stratégiques no 9, année 2019, 199p. Table du numéro dans : Jean Marcou (dir.), « La Turquie et ses nouveaux « alliés » », Orients Stratégiques no 9, année 2019, 199p. – Questions d’Orient – Questions d’Occident (questionsorientoccident.blog)

[8] Voir notre article: « Du golfe Persique à la mer Rouge et à la Corne de l’Afrique: les convergences entre la Turquie et le Qatar» , in Jean MARCOU (dir.), La Turquie et ses nouveaux « alliés », op.cit.  p.93-104.


Hicham Mourad lors d’un débat à l’IReMMO, Paris, 2014