
L’iconographie de la reprise de démission du ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif
Pour accompagner l’annonce de la reprise de sa démission, le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif a publié le 1er mars sur son compte Instagram (https://www.instagram.com/jzarif_ir/ ), une vue de coquelicots flamboyants avec, en arrière-plan, le volcan Damāvand (دماوند ) , le point culminant (5610m) de la chaîne de l’Elbourz, au nord-est de Téhéran, dominant la province caspienne du Mazandaran. Comme toute iconographie dans la République islamique, ce cliché, vraisemblablement un montage, fait doublement sens.

Les coquelicots, rouge sang, sont en Iran omniprésents dans les cimetières civils ou militaires et autres mausolées, et dans l’iconographie, comme rappel des martyrs morts dans l’histoire tourmentée du chiisme, ou dans les combats récents -par exemple lors de la guerre Irak-Iran (1980-1988) fondatrice d’identité de la République islamique.
Le volcan Damāvand occupe une place toute particulière dans la mythologie iranienne, comme symbole de la résistance au despotisme et aux menaces d’hégémonie étrangères. Dans la mythologie zoroastrienne, le dragon à trois têtes Aži Dahāka restera enchaîné au mont Damāvand jusqu’à la fin des temps. Dans une version plus tardive de la même légende, le tyran Zahhāk (ضحّاک) est également enchaîné au Damāvand après avoir été battu par Kāveh et Fereydūn. Un épisode largement développé dans le Shâh Nâmeh, Le Livre des Rois, oeuvre majeure du poète Ferdowsi (v.940-v.1020). Dans la légende d’Arash l’archer ( آرش تیرانداز ), Damāvand est le lieu d’où le héros lance sa flèche magique pour marquer la frontière entre l’Iran et le territoire des Touraniens du roi et général Afrasiab.

Le tyran Zahhāk enchaîné dans une grotte sur le flanc du Mont Damavand,
enluminure dans le Shâh Nâmeh de Baysanghori (1430).
Avec ses pouvoirs magiques, le Damāvand est donc, dans la poésie et la littérature persanes, le symbole de la résistance iranienne à toute domination étrangère. Dans le contexte du bras de fer autour de sa démission, Mohammad Javad Zarif n’a pas choisi cette image, aux référents implicites zoroastriens, persans et chiites, au hasard.