15 mars 2011: le roi Hamad al-Khalifa proclame l’état d’urgence au Bahreïn (capture d’écran, JPB)

Au Bahreïn, le « printemps de Manama » aura duré un mois, du 14 février au 16 mars. Il a été brisé en une brève séquence: l’arrivée de troupes saoudiennes lundi 14 mars; la proclamation de l’état d’urgence par le roi du Bahreïn mardi 15 mars; l’intervention violente de la police pour évacuer la place de la Perle, épicentre de la mobilisation, mercredi 16 mars. La violence symbolique qui clôt localement cette séquence aura été la destruction du monument de la Perle sur la place éponyme le vendredi 18 mars.

Cet épisode peu médiatisé des « révolutions arabes » (les chiites ont mauvaise presse dans les médias de pays très majoritairement sunnites), provisoirement clos, a clarifié les objectifs de Riyad face aux chiites et à l’Iran. Il confirme le rôle de l’Arabie saoudite et du Conseil de coopération du Golfe d’abord, en matière d’action « contre-révolutionnaire ». Il interpelle sur l’attitude des Etats-Unis ensuite.

Omniprésent au Bahreïn (qui abrite la Ve Flotte) et dans le Golfe (où sont installées une demi douzaines de bases, principalement aériennes), Washington a laissé les pétromonarchies  écraser le mouvement démocratique de Manama, et a revalorisé de fait le discours alarmiste sur « le croissant chiite » et le rôle de l’Iran qui est systématiquement rendus responsables de la « subversion sectaire » par les pouvoirs de Manama et de Riyad.


Force est donc de considérer que le soutien américain à la démocratisation est  différentiel: politiquement proactif à Tunis et au Caire, militairement interventionniste -mais sans enthousiasme- à Benghazi et Tripoli, totalement absent à Manama, et silencieux à Sanaa. Quel est, dès lors, le critère déterminant de l’engagement démocratique américain:  la sécurité des routes du pétrole? le maintien en place des pétromonarchies? une « menace chiite » instrumentalisée par l’Iran? …