C’est la Saudi Press Agency (SPA, officielle), relayée par la Bahrain News Agency (BNA, officielle) qui l’a annoncé mardi 26 septembre : trois soldats (dont un officier) ont été tués et un nombre non précisé d’autres ont été blessés dans l’attaque, lundi 25, d’une patrouille bahreïnie à la frontière entre l’Arabie saoudite et le Yémen. Ils ont apparemment été victimes d’une attaque de drones – selon certaines sources, sur la batterie d’artillerie avec laquelle les Bahreïnis tiraient en direction du territoire yéménite. Manama n’évoque, de son côté, qu’une « patrouille de sécurisation de la frontière saoudienne »…

Ce qui permet de rappeler que le royaume de Bahreïn fait partie depuis le début de la vaste coalition (les opérations Decisive Storm puis Restoring Hope) que le prince-héritier Mohammed ben Salmane (MBS) avait mise en place en 2015 pour attaquer les houthis zaïdites du nord du Yémen, qui venaient de s’emparer depuis peu de Sanaa au détriment du gouvernement inféodé à Riyad. Coalition qui s’est progressivement effritée au fur et à mesure que la guerre s’éternisait, et que les divergences entre les deux acteurs principaux (Riyad et Abou Dhabi) s’aggravaient sur ce que devait être l’avenir du Yémen ravagé et par une guerre interne, et par cette guerre régionale.



Bahreïn s’est engagé à la fois parce que le royaume est dans l’orbite diplomatique et militaire de son puissant voisin (le seul écart entre les deux pays tenant à la participation – Manama, ou la non-participation – Riyad, aux accords d’Abraham avec Israël). Et parce que très vite, et largement pour justifier son expédition militaire au Yémen (y compris à Washington), Riyad a systématiquement qualifié les houthis de « rebelles chiites alliés de Téhéran » – ce qui était loin d’être le cas initialement, mais a fini par le devenir malgré les multiples obstacles à ce parrainage affirmé.

Or la répression de son opposition interne est justifiée depuis 2011 (voir même avant) par la monarchie sunnite bahreïnie des Al Khalifa par la responsabilité première supposée de la République islamique chiite dans « les troubles » et « les actions terroristes » dans l’archipel. Depuis 2015, toute critique de l’intervention de la coalition saoudienne au Yémen, et plus encore toute mention de la participation bahreïnie, entre dans la catégorie du « complot contre le Royaume  en relation avec une puissance étrangère ».

C’est à travers des « incidents » de ce type – des morts dans un accrochage frontalier, des témoignages sur des massacres de migrants éthiopiens et érythréens par des patrouilles saoudiennes – que la conflictualité yéménite ressurgit épisodiquement. La guerre au Yémen n’est pas terminée, malgré une dernière année marquée par une diminution sensible des combats sur le terrain, et quelques ouvertures diplomatiques récentes. Oman joue, selon une longue tradition, les médiateurs dans le conflit. Il y a quelques jours, des responsables houthis se sont rendus à Riyad pour cinq jours de pourparlers : la première visite publique d’une délégation houthie en Arabie saoudite depuis le début des hostilités.

Bahreïn a reçu de multiples témoignages de solidarité de la totalité du monde arabo-musulman (CCG, OCI, Ligue arabe, etc.), de ses alliés occidentaux (les Etats-Unis) ou non (le télégramme de soutien de Moscou est arrivé très rapidement : « Moscow opposes any use of force that leads to casualties, destruction of socio-economic infrastructure and undermines peacekeeping efforts. » -sic !). Et ces derniers jours, la BNA publie en continu d’innombrables hommages de tous les corps constitués du royaume adressés au roi, et au prince-héritier et Premier ministre.




Sources:

Saudi Press Agency, Bahrain News Agency (textes et illustrations)